Jeu terminé
🤓 Émulation sur PC
Enfant, je me souviens avoir eu entre les mains Illusion of Time. Malheur à moi : il était en allemand et je n’y ai absolument rien compris. Je découvre réellement le travail de Quintet avec ce Terranigma, que j’avais déjà aperçu dans des boutiques spécialisées de revente de jeux, à un prix prohibitif. D’emblée, on ressent qu’il s’agit d’un de ces jeux tardifs de la SNES. Sorti en 1996, à une époque où tout le monde était obnubilé par la 3D, Terranigma a dû sembler presque anachronique. Et pourtant, en 2025 — époque où le pixel art cohabite avec le ray tracing — on est clairement plus ouvert à revenir à une esthétique 16 bits qui, dans mon cas, me ramène à ma tendre enfance. Le jeu est magnifique, avec des animations de personnages détaillées et des musiques enchanteresses. Un autre aspect que j’ai trouvé très novateur dans ce titre est le move set du personnage principal, capable de sprinter, de faire des attaques plongeantes et des dashs. Si l’on met de côté le système de magie (totalement raté à mon sens), il y a un réel plaisir à manipuler Ark. Rejouez parallèlement à Link to the Past et vous aurez l’impression que Link se déplace comme un tank. Cependant, il y a une raison pour laquelle on recommande encore aujourd’hui de jouer à Link to the Past et non à Terranigma. Le jeu alterne entre exploration de villages et de la world map, et passages en donjon avec combats de boss. Ces donjons ont un level design très discutable, où l’on se retrouve souvent perdu (sans carte). Il y a globalement un manque de lisibilité dans ce jeu : on ne sait pas toujours où l’on peut passer ni avec quels objets interagir. Autant j’ai fait le premier tiers en solo, autant j’ai progressivement eu besoin d’utiliser un guide pour arriver au bout. Concernant sa narration, le moins que l’on puisse dire, c’est que Terranigma a eu les yeux plus gros que le ventre. On doit permettre à la vie sur Terre d’évoluer, de l’ère préhistorique au XXIᵉ siècle (en gros). Notre héros est une sorte de figure magique qui traverse le temps et permet le passage d’une ère à l’autre. Le tout donne un méta-récit presque créationniste et confondant de naïveté, où l’on sauve, par exemple, Christophe Colomb d’une prison (ce qui permet la découverte de l’Amérique), ou encore où l’on fournit une feuille d’étain à un vendeur de sardines, ce qui lui permet d’inventer la conserve et donc d’entrer dans l’ère industrielle. Cela m’a rappelé des dessins animés du type Les Inventeurs ou Il était une fois la vie. C’est un grand récit surplombant qui fait qu’on ne s’attache pas réellement aux personnages, tant ils sont nombreux et vite oubliés. Ils sont là pour illustrer un moment de l’Histoire avec un grand H. En termes de gameplay, ce récit-monde créationniste se traduit malheureusement par des quêtes fed-ex constantes, nous obligeant à aller de ville en ville. Le souci, c’est que le jeu est avare en explications. Pas d’objectifs de quête précis : on est souvent livré à soi-même pour savoir quoi faire. Exemple : à un moment, une ville brûle et est presque entièrement détruite. Un PNJ nous confie neuf lettres et nous demande de trouver des mécènes pour la reconstruire. À ce moment-là, aucune indication vers qui se tourner, alors qu’il y a déjà une centaine de PNJ avec lesquels on peut interagir. C’est trop, c’est frustrant, et on retombe assez vite dans la recherche d’informations via un guide. Ce qui est sûr, c’est que le jeu ne manque pas d’audace. Il propose même des mécaniques intéressantes, comme celle de faire évoluer des villes. À savoir que le seul système politique « valide » dans le jeu est celui du libéralisme économique, fondé sur le libre-échange et un leader fort et influent. Je ne peux que saluer les jeux qui tentent des choses nouvelles, et en ce sens Terranigma nous noie sous des idées intéressantes, certes, mais pas assez peaufinées. Hormis le combat contre Blood Mary (un enfer), les affrontements de boss sont intéressants et assez prenants. On aurait aimé peut-être plus de donjons et de boss, et moins d’allers-retours incessants dans les villes. Très difficile à recommander, Terranigma mériterait un sérieux remake pour devenir un classique. Trop vague, trop flou dans ses intentions, il repose pourtant sur une base esthétique et des mécaniques de combat très solides. On sent qu’il a été fait avec du cœur, mais sans doute pas avec assez de moyens. On rencontre d’ailleurs les développeurs dans le jeu, qui expriment mot pour mot qu’ils se réjouissent de terminer le projet pour enfin retrouver du temps libre et des week-ends de deux jours. Réalisé à la toute fin de vie de la SNES, le jeu aurait peut-être mérité de devenir un titre PS1. Mais bon, contrairement à Ark, je ne suis pas là pour réécrire l’histoire.
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